L’étude conduite par le chercheur Joeri Zwerts et son équipe a utilisé 474 pièges photographiques dans 14 concessions forestières (sept certifiées FSC et sept non-certifiées FSC) dans le bassin du Congo. Sur les trois à quatre années de travail de terrain (d’une période de surveillance de deux à trois mois pour chaque concession), ces pièges ont pris 1,3 millions d’images, et photographié environ 55 espèces de mammifères dont des léopards et des gorilles, ainsi que diverses espèces menacées.
La certification FSC comme un refuge pour les grands mammifères
A travers la consignation du nombre d’animaux et le positionnement stratégique les pièges photographiques, la recherche menée par le chercheur Joeri Zwerts a confirmé que les concessions certifiées abritaient une population de grands mammifères plus importante (2,7 fois plus de mammifères de plus de 100 kg tels que les gorilles et les éléphants de forêt, et 2,5 fois plus d’animaux de 30 à 100 kg tels que les léopards et les chimpanzés) par rapport aux concessions forestières non-certifiées. Le nombre de petits mammifères observés était similaire dans les concessions certifiées FSC et non FSC, ce qui donne une image d’une moindre biodiversité dans ces dernières forêts. Les effets étaient semblables au Gabon et au Congo. De plus, le taux de grands mammifères observés dans les forêts certifiées était comparable aux données publiées dans des zones protégées récemment contrôlées dans la région du bassin du Congo, considéré comme le deuxième poumon forestier du monde après l’Amazonie.
Le rôle des grands mammifères dans la dispersion des graines, le cycle des nutriments et le stockage du carbone forestier
L’étude met également en exergue le rôle crucial de la chasse dans la perte de biodiversité, et met l’accent sur le nombre réduit de signes de chasse et l’augmentation des observations de la faune dans les concessions certifiées FSC. « Les mesures proactives prises par les entités forestières certifiées, telles que le blocage des anciennes routes d’exploitation, l’établissement de points de contrôle et le soutien à des sources de protéines alternatives pour les populations locales ont réduit de façon significative la chasse illégale », précise le document. Par ailleurs, la préservation des grands mammifères a une influence positive sur la dispersion des graines, le cycle des nutriments et le stockage du carbone forestier. A en croire de précédentes études, les forêts tropicales stockeraient potentiellement 7% de carbone en moins sans la présence d’éléphants.
La gestion forestière responsable : un pilier important pour la préservation de la biodiversité
L’autre aspect qui ressort de l’étude est la contribution des pratiques forestières durables à la préservation d’importantes populations de grands mammifères et à la protection des forêts tropicales existantes. Dans une large mesure, les communautés locales tirent des valeurs économiques et sociales de la sylviculture certifiée, contrairement aux activités de déboisement telles que la culture du palmier à huile ou de soja. Cette étude est la première à comparer autant de zones forestières différentes en même temps. Elle « représentait un vaste projet ambitieux qui a duré cinq ans et impliqué des centaines d’employés locaux. Nous avons dû convaincre les entreprises certifiées comme non-certifiées de participer à l’étude. Ce travail dans des conditions difficiles s’est révélé éprouvant, mais les connaissances que nous avons acquises seront très utiles pour la protection des animaux dans les forêts tropicales », a expliqué Joeri Zwerts.
A sa suite, le directeur régional du WWF pour le bassin du Congo, Martin Kabaluapa, déclare que « ces résultats sont une source d’inspiration et une indication que le FSC continue d’être un outil efficace dans les forêts tropicales et que ses normes se traduisent par des impacts tangibles. Il existe des solutions qui profitent à la fois aux populations et à la nature, et la certification de gestion forestière responsable est l’une de ces solutions vitales ». Et de poursuivre : « Nous encourageons les entreprises du bassin du Congo à poursuivre la certification FSC et à investir davantage dans la recherche qui peut aider à informer l’amélioration continue de ces mécanismes ».
La certification FSC comme gage de gestion responsable des ressources naturelles du bassin du Congo
Quant au directeur régional du FSC en Afrique, Peter Alele (PhD), l’importance de la certification FSC dans la gestion responsable des ressources naturelles du bassin du Congo n’est plus à démontrer. « Les résultats de l’étude démontrent de manière convaincante que les solutions FSC permettent aux gouvernements d’atteindre les objectifs nationaux de conservation des forêts et de protection de la biodiversité, tout en favorisant les moyens de subsistance des communautés locales », a-t-il précisé. Les concessions forestières représentent plus de la moitié des zones forestières restantes dans les deux pays étudiés, soit 67% au Gabon et 61% au Congo.
Fiona Maisels, co-auteure de l’article et chercheure scientifique travaillant avec WCS, souligne pour sa part que « les écologistes spécialistes des régions tropicales savent depuis un certain temps que la certification FSC contribue au maintien des populations de grands mammifères, d’après des études comparant une zone protégée unique aux concessions adjacentes ». Cependant, ajoute-t-elle, c’est la première fois qu’un ensemble de concessions de gestion certifiées et non-certifiées ont été incluses dans une étude soigneusement conçue et portant sur une vaste zone géographique. Les résultats sont limpides : les grands animaux dont la situation est préoccupante (tels que les éléphants de forêts et les grands singes) se portent mieux dans les forêts certifiées FSC.